Aujourd’hui, une discussion et un échange de points de vues avec une collègue de travail et amie. Presque une dispute, de la colère – et de la distance tout de même. Un constat : face à une prise de pouvoir, je me positionne presque toujours comme un contre-pouvoir. J’ai l’impression que se jouent en moi toutes les grandes révoltes : face à une injustice – ici une prise de pouvoir qui sape toute une dynamique de groupe – je réagis d’un poing de fer frappé sur la table. Et j’ai l’impression d’être juste : je fais au mieux pour avoir un propos détaché, factuel, et dans le cœur. Pourtant, quelque chose me dérange : déjà, le fait de réagir. Si j’aspire à agir seulement, force est d’admettre que j’en suis encore loin. Ensuite, le fait d’être l’instrument de forces qui me dépassent et qui passent à travers moi.
Comme beaucoup, je pourrais me rassurer en prétendant que ces forces sont justes ; que c’est la main de Mère qui me pousse à ces réactions. Et en réalité, Mère est partout – ce serait donc vrai, quelque part. Une vérité partielle. Mais si je regarde les choses avec sincérité, je ne sais ce qui me traverse dans ces moments-là. Un égrégore, peut-être, celui de l’injustice humaine ; ou des forces latentes qui veulent percer les silences et, en émergeant, exister à pleine lumière. Un cri qui veut traverser le voile, et qui a besoin d’un fer de lance – alors je me métamorphose en lame tranchante, pour séparer le faux du vrai.
Plus je m’observe et plus je réalise que je ne contrôle rien. C’est une illusion persistante que de penser qu’on est maître de soi. Je suis sans cesse traversé par de l’altérité connue – que je porte aussi en moi – et je résulte d’une danse de ces mouvements contraires et complémentaires.
Comment trouver l’Unité humaine et du vivant quand on est soi-même en permanent mouvement ? Quand les flux qui nous tissent divergent tant, s’écoulent dans des rivières si lointaines les unes des autres, si composites, si disparates ? Quand l’on est déjà, à chaque instant, étranger à soi-même ?
Si chaque homme porte en lui toutes les altérités, la complexité infinitésimale d’un univers en expansion, comment tendre vers une unité durable, mouvante et nourrie par la source ?
Tout le yoga est là…observer ces mouvements pour y mettre de la conscience…